La certification biologique en apiculture

La certification biologique en apiculture

 

Ah la certification biologique en apiculture ! Ça soulève les passions... 

Au-delà des opinions, c'est quoi la certification biologique apicole ? Les gens moins bien informés diront qu'il est impossible de retenir les abeilles d'aller butiner où elles veulent et que la certification est par conséquent invalidée. Vous êtes de cette opinion ? Vous êtes la personne qui doit lire ceci. 

Sans entrer dans tous les détails techniques (la norme, c'est lourd ! 😩), il est important de savoir que plusieurs facettes de la régie apicole sont scrutées à la loupe par le certificateur avant d'émettre le certificat. On regarde :

  • où sont placées les colonies (j'y reviens plus loin),
  • quels produits sont utilisés pour traiter les maladies,
  • d'où viennent les abeilles domestiques Apis mellifera (je rappelle que les abeilles ne sont pas indigènes au Canada, ni en Amérique du Nord, ni en Amérique au complet !),
  • comment elles sont nourries durant l'hiver et lors des autres périodes de disette,
  • le type de matériel utilisé pour les héberger,
  • ainsi que plein d'autres détails techniques.

 

Développons maintenant sur l'emplacement des colonies. C'est sur ce point que la plupart des gens propagent la désinformation. L'apiculteur professionnel, certifié bio ou non, doit s'assurer qu'il place ses protégées dans un environnement sain pour elles. C'est de l'apiculture éthique et responsable. Malheureusement, de bonne foi ou non, beaucoup d'apiculteurs n'ont pas la connaissance de l'environnement de 3000 ha autour de leurs ruchers (groupe de ruches installées au même endroit). La certification bio vient le... certifier ! L'apiculteur sait que le rayon de butinage normal des abeilles est de 3 km autour des ruches (ou 3000 hectares en superficie). Idéalement, l'abeille butine le plus près possible de sa ruche. Pour faire une image simple, imaginez-vous que si elles le pouvaient, elles resteraient très près de sa ruche, étant de nature économe. Mais s'il n'y a pas assez de ressources, elle va aller de plus en plus loin pour se nourrir, contre son gré... Si un apiculteur dit que l'abeille peut aller butiner jusqu'à 10 km, c'est techniquement vrai, mais il devrait aussi vous dire qu'elle va consommer au retour ce qu'elle vient de butiner. Ce n'est donc pas viable (ou non sustainable) ! Si l'apiculteur est assez consciencieux du bien-être de ses abeilles, il ne laissera pas ses abeilles butiner à 10 km et par conséquent, il s'assurera qu'elles aient assez de ressources dans le rayon normal de butinage de 3 km pour ne pas qu'elles aient à aller plus loin, et ainsi s'épuiser et avoir un bilan de récolte négatif. La certification biologique s'assure donc d'abord que l'on place nos colonies dans un environnement riche en fleurs sauvages afin qu'elles butinent sur la plus courte distance possible, et certainement à l'intérieur de 3 km de rayon.

Mais quoi regarder à l'intérieur de ce 3 km, outre la richesse des fleurs ? Tout ! 100% de la superficie est analysée. Tout ce qui est "sauvage et naturel" score fort. Les perturbations humaines (zones urbaines, industries, productions autres qu'agricoles) sont presque systématiquement rejetées. Les zones agricoles sont évaluées au cas par cas. Si d'une part ce ne sont pas des cultures attractives* pour les abeilles et qu'elles sont marginales, ces zones ne sont généralement pas rejetées même si elles sont en agriculture traditionnelle (non bio). Si d'autre part ce sont des cultures attractives, elles doivent être en régie biologique pour être acceptées dans un rayon de butinage de 3 km. À moins qu'elles soient très marginales, et à la limite de ce rayon. À titre de comparaison, en Europe, ce secteur décrit ici doit correspondre à seulement 50% de la zone de butinage normal de 3 km (ici, 100%).

Nous avons au Canada l'une des normes biologiques apicoles les plus sévères au monde. Ceci fait en sorte que très peu d'entreprises apicoles possèdent une certification biologique (11 apiculteurs au Québec et seulement 25 dans tout le Canada au moment d'écrire ces lignes). Cela nous empêche de bien nous positionner dans l'industrie du miel biologique mondial, et fait aussi en sorte que le miel bio des autres pays soit largement mieux représenté ici même, en sol canadien. Ce qui est aberrant, vous en conviendrez.

Il y aura toujours des détracteurs dans tout...! 😄

Plusieurs producteurs (pas seulement en apiculture) disent qu'ils ont une production "biologique", mais ne sont pas certifiés pour des raisons x, y et z. La certification biologique vient justement certifier au consommateur que le producteur adhère à et suit une norme sévère, et se fait vérifier afin d'assurer le client que ce qu'il achète rencontre bel et bien les exigences de la norme. C'est l'essence même de la certification ! Sinon, bien évidemment, tout le monde peut bien dire n'importe quoi. D'ailleurs, il est frauduleux de dire qu'une production est biologique si elle n'est pas certifiée. Le consommateur est protégé de cette façon.

Bien peu de gens connaissent bien la norme en fait, mais se montrent comme des spécialistes et rapportent des faussetés pour discréditer l'appellation biologique. Les producteurs qui sont détracteurs de la certification bio disant que c'est de la poudre aux yeux, mais en contrepartie s'auto-proclament bien au-delà de cette norme en utilisant des termes non normés pour décrire leur business se discréditent eux-mêmes. Pourquoi se comparer à la certification biologique en utilisant des termes favorables synonymes à "biologiques", mais ne veulent pas être certifiés ? Se poser la question, c'est y répondre.

Quand c'est le consommateur qui discrédite les produits bios, on se dit simplement qu'il n'est pas le public cible. Pas plus compliqué que ça ! Tant qu'il y aura des gens qui recherchent cette étiquette, il y aura les produits certifiés. Quand tout le monde n'en voudra plus, il n'y en aura plus.

* Culture non attractive : Culture sans fleurs ou dont les fleurs ne donnent ni nectar ni pollen et n'ont par conséquent aucun intérêt pour les abeilles.

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